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    (Retrouvez la 1ère partie ici)

    Depuis la fameuse loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique, qui a suscité énormément d’attentes, d’espoirs mais aussi de craintes, les textes d’application étaient évidemment très attendus. C’est finalement le 10 mai dernier que les deux premiers décrets d’application, en date du 9 mai 2017, ont été publiés au Journal Officiel.

    Le deuxième décret[1] porte quant à lui sur le statut des « joueurs professionnels salariés du jeu vidéo compétitif » et fait également déjà beaucoup de bruit en raison des risques qu’il fait peser sur l’écosystème français de l’eSport. Il entrera en vigueur le 1er juillet 2017.

    Après une première partie sur les éléments de cette réforme, la seconde présente les conséquences pour le statut des joueurs professionnels.

    II – Conséquences de la réforme sur le statut des joueurs professionnels

    Alourdissement administratif et complexité juridique

    Ce qui frappe dès la première approche, c’est que si la réforme clarifie certains points et remplit d’importants vides juridiques, elle complexifie également le droit en vigueur, notamment du fait de l’utilisation de critères discutables, ce qui ne manquera pas de fragiliser un écosystème encore fragile et des organisations eSportives encore naissantes.

    En ce qui concerne par exemple la notion de saison, on sait que selon le jeu ou selon le niveau de l’équipe, l’aspect saisonnier est fort différent voire inexistant. On se demande donc comment l’Etat va procéder et quel sera son niveau d’expertise, car il paraît difficile d’imaginer que telle ou telle définition n’impactera pas négativement certaines organisations notamment celles suivant des circuits de compétitions particuliers. C’est notamment le cas de petites équipes de Counter-Strike : Global-Offensive qui participent à des tournois doté d’un cash-prize faible et pouvant émerger aléatoirement sur le calendrier sans que cela ne puisse être anticipé.

    De même, on peut se demander quelle sera la nature du contrôle opéré par le ministre en charge du numérique lors de la procédure d’agrément. Les conditions seront-elles interprétées strictement ? Quid du refus d’octroi de l’agrément à une société naissante dont le business plan reposait sur le fait d’être une société agréée ? Comment l’Etat va-t-il juger que telle ou telle société a ou non la capacité de fournir les moyens nécessaires à l’accomplissement de sa mission ou remplit la condition d’encadrement ? Autant de questions qui justifient la crainte d’une réelle insécurité juridique.

    De manière générale, si on prend en compte les nouvelles charges administratives (comme la procédure d’agrément), la nécessité de recourir de plus en plus souvent à une assistance juridique et le suivi juridique des arrêtés, il peut être regretté que la loi et le décret, rentrant dans un niveau de détail important, complexifient au final le cadre juridique et le rendent moins lisible contrairement aux volontés initiales.

    « Grâce à un droit du travail protecteur, les joueurs se retrouveront donc dans une situation incontestablement moins précaire, ce qui peut favoriser des vocations. »

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    Protection des joueurs et alourdissement des charges

    Désormais, le joueur au sens de la loi se verra appliqué le Code du Travail à quelques exceptions près. Grâce à un droit du travail protecteur, les joueurs se retrouveront donc dans une situation incontestablement moins précaire, ce qui peut favoriser des vocations[3]. Par ailleurs, le recours au contrat de prestations de services[4], préféré à l’heure actuelle par les organisations eSportives françaises, a ses inconvénients, car outre la faible protection sociale des joueurs, les équipes elles-mêmes ne peuvent empêcher le départ de leurs talents.

    Mais l’application du Code du Travail sera également un choc administratif et financier pour la plupart des organisations actuelles. Certes, théoriquement, les contrats de prestations de services peuvent toujours être utilisés, mais la réforme rend quasi-certain leur requalification juridique en contrat de travail par le juge, même s’il faudra garder un œil attentif sur la jurisprudence à ce niveau. Dès lors, en raison des charges sociales imposées par le droit du travail, le business model utilisé par la plupart des organisations eSportives françaises et éprouvé sur plusieurs années voire décennies va être intégralement remis en question.

    Aussi, dans un contexte de concurrence internationale importante, peut-on craindre un ralentissement du développement de l’eSport en France, car comme dans le sport, les sociétés françaises devront payer plus à salaire égal, ce qui nuira bien entendu à leur compétitivité et à leur attractivité pour récupérer les meilleurs talents internationaux.

    Malgré les défauts réels de ces textes, il faut tout de même se réjouir du volontarisme des pouvoirs publics qui ont fait preuve d’une véritable bonne intention pour favoriser l’eSport. Le développement d’un cadre juridique sportif a pris des décennies avant d’être stabilisé et mature, il était donc inconcevable d’obtenir un cadre juridique parfait du premier coup pour une pratique aussi nouvelle qu’est l’eSport. C’est donc grâce à un travail durable, de nombreux échanges et une importante réflexion empirique qu’il se perfectionnera.

    [3] On pense notamment à l’impact d’un contrat de travail sur la bonne volonté des parents.

    [4] Les joueurs professionnels ont souvent le statut d’auto-entrepreneur. En cas de revenus importants, ils optent pour la société par actions simplifiées.

    Cet article a été rédigé par Sylvain Granados (@SydHoon_Lol) et initialement publié sur eSports Daily News.


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